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Arrivée d’Emmanuel Macron au Cameroun : L’opposition en quête de visibilité

L es oppositions africaines doiventelles ou ne doivent-elles pas solliciter des audiences auprès des Chefs d'État étrangers en visite dans leurs pays ? Focus sur l'actualité : l'opposition camerounaise, par quelque formation politique que ce soit, devait-elle demander à être reçue par le Président français, Emmanuel MACRON, en visite officielle au Cameroun, les 25, 26, 27 juillet 2022 ? Parole au "kongossa" des Camerounais de la rue.

1. Moi, opposant et fier de l'être.

Notre démarche se veut républicaine et responsable. Comme tel, nous l'assumons pleinement. La France est un interlocuteur privilégié du Cameroun, de l'Afrique et même du monde. C'est la 5ème puissance économique mondiale. Elle assure la présidence de l'Union Européenne, partenaire d'importance pour l'Afrique au regard des relations historiques tissées entre l'Europe et l'Afrique. En conséquence, demander à rencontrer officiellement le Président de la République Française en visite dans notre pays, c'est saisir l'opportunité qui se présente à l'effet d'échanger sur divers sujets touchant à l'actualité nationale et internationale ; à l'avenir de la planète en proie aux dérèglements climatiques, à la guerre et autres tensions multiformes...

Attention ! Attention !

Est-ce que l'agenda que vous déroulez si bien, ne relève pas des prérogatives des autorités en place ? Ne seriez-vous pas tenté (hanté !) par le syndrome de César à la place de César ?

- Les autorités, comme vous dites, présentent un point de vue. Le leur. Nous avons le nôtre à présenter sur différents dossiers. Boko Haram dans l'Extrême-Nord, risque sécessionniste dans le NOSO, transitions politiques en Afrique, marasme économique ambiant... Quelle serait l'originalité de votre position que l'on ne sache déjà ?

- Laissez donc l'exclusivité de notre opinion à qui de droit... Les Camerounais sont vos premiers interlocuteurs. Ils ont le droit de savoir.

- Tout à fait. Ils sont nos interlocuteurs de tous les jours. Laissez-nous parler à l'étranger de passage, à l'ami, au partenaire du Cameroun dont l'avenir proche et lointain sera ce que nous en ferons ensemble.

N'oubliez pas que dans notre pays, selon les dispositions constitutionnelles, les partis politiques participent à l'expression du suffrage universel. Et donc, à l'animation de la vie démocratique. C'est dans les urnes que ça se passe, SVP

- En dehors des urnes aussi, je vous en prie ! La vie politique ne commence ni ne s'arrête avec les élections.

2. Parole à la société civile

Je salue l'acuité des répliques de l'opposition. Mais, je me désole devant l'avidité de ses prétentions, et même devant la vacuité de ses ambitions.

Au Cameroun, tenons-le pour dit, il y a un seul Président de la République, élu ; le seul à avoir reçu mandat officiel de parler au nom du peuple camerounais. Depuis 2018, année de la dernière élection présidentielle, ce Porte-parole, c'est Monsieur Paul BIYA.

Voulez-vous décréter le musellement de l'opposition ?

- Permettez que j'aille jusqu'au bout de mon propos. L'opposition (la vraie) dispose d'autres canaux ou créneaux pour faire entendre sa voix. Elle a déjà commencé par les réseaux sociaux, les lettres ouvertes, les communiqués de presse ou des interviews dans les médias. Il est même arrivé que l'on ait recours aux pétitions. Toutes ces voies de communication restent ouvertes à tous. Quant à demander une audience officielle, à inscrire dans l'agenda officiel, en visite officielle, souffrez que j'exprime humblement, ma réserve. Tant sur le principe que sur les objectifs d'une telle démarche. Quelle en est l'opportunité ? Y a-t-il crise (ouverte) entre l'opposition et les tenants du pouvoir au Cameroun pour justifier l'arbitrage ou la médiation du Président français, Monsieur Emmanuel MACRON ? Pourrait-on légitimer une telle démarche lorsqu'un Chef d'État africain ou autre, viendrait à effectuer une visite officielle au Cameroun ou dans un autre pays africain ? Dans les usages diplomatiques, il est courant de voir un Chef d'État étranger en visite officielle dans un pays, rencontrer ses compatriotes résidant dans le pays d'accueil. Mais, rencontrer l'opposition politique du pays d'accueil, sauf circonstances exceptionnelles, pourrait friser l'ingérence, l'immixtion dans les affaires intérieures du pays partenaire. En tout état de cause, la valise ou le fil diplomatique existe, qui achemine l'information de diverses sources, en temps réel, sur le pays hôte. Ces informations peuvent nourrir le discours du Président visiteur, et le cas échéant, enrichir les échanges avec les autorités établies. Je peux me tromper, ce sont les usages en la matière. Et il vaut mieux s'en tenir à ce protocole surtout lorsque la réciprocité n'est pas acquise.

3. Moi, simple observateur intéressé

Qu'il vous plaise de consigner ceci : les règles de civilité diplomatique, exigent que l'on neasse rien qui désoblige son hôte. C'est pour cette raison que les visites, d'État à État, comme celle du Président français auprès de son homologue camerounais, font l'objet de concertations préalables sur la nature de la visite, le format à lui accorder, les points d'attention, l'agencement de l'agenda. Etc. Que les deux Chefs d'État s'entendent sur le principe d'une entrevue avec les responsables de l'opposition, et même de la société civile, en quoi cela peut-il nuire, si l'initiative contribue à faire avancer la cause démocratique ? Pourvu que l'essentiel des partis dits d'opposition y soit représenté. Sans céder à une "conférence nationale" qui reste "sans objet" au Cameroun. Même si, entre temps, beaucoup d'eau a coulé sous le pont...

Seulement, ne l'oubliez pas : apaisement est le leitmotiv de la politique du Chef de l'État, Paul BIYA. Lui, le "mendiant de la paix". Lui, l'apôtre de la "démocratie apaisée". Pour lui, l'essentiel, c'est que les hommes et les femmes de bonne volonté, chacun à son niveau, participent à l'édification d'un monde de paix et de progrès. D'où son plaidoyer incessant en faveur du multiculturalisme. Je ne vous apprends rien en vous rappelant que M. Bertrand BADIE est, en la matière, l'un de ses grands inspirateurs. Il a eu déjà à le citer dans un discours public. Ce politiste français, spécialiste des relations internationales "aborde les conflits et crises internationales comme des pathologies sociales, héritées d'un système international producteur d'anomie (situation de perte de repères), d'exclusion ou d'humiliation". La solution repose, selon lui, sur la notion d'intégration sociale internationale (pour les États comme pour les sociétés), à travers notamment la mise en œuvre d'un multilatéralisme inclusif. Sur ce prolongement, je peux me permettre de ne pas conclure ce débat. Sauf à indiquer que notre monde a besoin de parler à plusieurs voix, sur la voie de la recherche permanente du consensus, du compromis. Sans céder aux compromissions. Le dialogue républicain, si cher au Chef de l'État, Paul BIYA, à l'instar du Grand Dialogue National organisé en 2019, doit se poursuivre et s'intensifier sous diverses formules et sur diverses tribunes. Comme l'ONU (à réformer ou à refonder). Comme le G20 (à élargir à toutes les puissances mondiales qui contribuent au maintien des grands équilibres, écologiques, climatiques, économiques, politiques, diplomatiques, sociologiques...). Et on va sortir par-là : "Les guerres prenant naissance dans l'esprit des hommes, c'est dans l'esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix". 

 

 

Ref: Le Qotidien, 22 juillet 2022