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Cameroun-Opinion : Hilaire Kamga « Il faut crédibiliser le processus électoral au Cameroun »

Hilaire Kamga

Pour le porte-parole de l’Offre-orange, c’est l’une des conditions pour pousser les Camerounais à s’inscrire.

Plusieurs opérations visant à amener les Camerounais à s’inscrire sur les listes électorales ont été lancées. Mais les chiffres stagnent. Qu’est-ce qui peut le justifier ?

Il faut rappeler que l’apathie électorale au Cameroun est un phénomène qui structure le processus électoral dans ce pays depuis le retour au multipartisme en 1991. C’est fort de n’avoir pas compris cela, et surtout d’avoir voulu à chaque fois faire semblant d’avoir inventé la roue, que des acteurs du processus électoral ou ceux qui s’y invitent ont, en reproduisant les mêmes schémas du passé, échoué dans les objectifs de boostage du corps électoral. En effet, fort de cette situation quasi récurrente, la Plate-forme de la société civile pour la démocratie a lancé en 2010 l'opération « 10 millions d’électeurs » dans le cadre de la caravane de la democratie qui a sillonné toutes les 10 régions du Cameroun. 

Ensuite des organisations de la société civile ont initié de manière pérenne des campagnes de sensibilisation depuis plus de 10 ans pour amener les citoyens à s’inscrire. Des partis politiques comme le MRC, l’AFP, le SDF, le PAGEN et bien d’autres ont fait de la sensibilisation des électeurs leur chantier privilégié. D’ailleurs depuis 02 ans, plusieurs organisations et partis politiques réunies au sein d’une Plate-forme dénommée Coacic conduisent une opération 15 millions d’électeurs que vous n’évoquez pas.

Aussi réduire les campagnes à celles que vous citez ci-haut pourrait traduire une insinuation aux objectifs inavoués. Cela étant dit, je dois préciser que depuis 2014, lors de l’évaluation de la Campagne «10 millions d’électeurs », nous sommes arrivées à la conclusion selon laquelle l’apathie électorale au Cameroun était déterminée par trois facteurs que sont : la non crédibilité du système électoral, la rationalité du citoyen/électeur camerounais et la paupérisation de la population. Concernant le postulat de la non crédibilité du système de dévolution au pouvoir au Cameroun, plus de 70% des citoyens en font la cause centrale de l’apathie généralisée.

En effet, les citoyens sont convaincus que les résultats des élections sont connus d’avance et par conséquence, cela ne sert à rien d’aller se prêter au jeu de la théâtralisation électorale. La rationalité du citoyen qui représente environs 21%, est comprise comme la capacité du citoyen à discerner dans les offres politiques, quant elles existent vraiment, celles qui sont susceptibles d’offrir un mieux être visible aux Camerounais qui subissent le régime du Renouveau. Cette rationalité pour se comprendre est adossée à l’analyse, sous le prisme d’une approche historique, des comportements des acteurs dit du Changement dans leur expérience de gestion des espaces locaux de pouvoir à eux confiés (notamment lors des municipales de 1992 et 1996,) ou de l’attitude des parlementaires de l’opposition des mandatures 1992, 1997 à 2002. Pour la plupart, en analysant les acteurs qui ont eu des parcelles de pouvoir, ils arrivent à la conclusion selon laquelle les élus d’hier ont « Changé » mais la mairie ou la gestion communale n’a pas « Changé », et donc le changement serait un marché de dupes.

Concernant enfin la pau- périsation qui a une part résiduelle dans les raisons de l’apathie, la contrainte de temps que le processus d’inscription sur la liste entraine pour certains est un temps nécessaire pour obtenir de quoi manger. Comment analysez-vous le rapport que les Camerounais ont avec la chose électorale ?

Le Régime de Yaoundé a réussi avec brio sa stratégie de déconstruction de la noblesse du modèle électoral comme mécanisme de légitimation des dirigeants. La chose électorale serait donc uniquement une mécanique de validation des choix déjà réalisés par des personnes détenant le vrai pouvoir. Il se crée donc naturellement une logique de distanciation objective des citoyens de la chose électorale dont l’inutilité en contexte de quasi monarchisation est actée.

En tant que spécialiste des questions électorales, quelle approche doit-on adopter pour inciter les Camerounais à s’inscrire ?

Ce n’est pas compliqué, j’aurai pu simplement recommander que l’on fasse une pression populaire au Régime de Yaoundé afin qu’enfin, on mette en œuvre l’obligation constitutionnelle de vote bien que le choix soit libre. Mais l’enjeu politique de cette violation récurrente de la constitution étant au cœur de la stratégie globale de fraude du pouvoir de M. Biya Paul, je conclus que cette démarche ne prospérera pas. Il nous reste donc de suggérer qu’une dynamique citoyenne incluant société civile et partis politiques se mettent en place pour développer une démarche de crédibilisation du processus électoral notamment avec d’une part une ré-priorisation de la revendication sur le Code électoral, mais aussi la conduite de sensibilisation des citoyens sur l’imparabilité de la Masse Critique Electorale ( que j’ai théorisée en 2009) comme élément fondamental pour faire respecter le choix du peuple, et d’autre part la nomination au niveau des structures de base d’Elecam des acteurs crédibles. En tout état de cause seule la MCE (Masse Critique Electorale) est la clé pour une révolution démocratique réussie.

 

© Source : Le Jour : Propos Recueillis Par Solière Champlain Paka