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Crise Anglophone : Question autour de l’élite

Le Pm Dion Ngute : certaines élites sont illégitimes et vomies.
Que ce soit dans le Nord-Ouest ou dans le Sud-Ouest, l’escalade de la violence illustre parfaitement la faillite d’une élite locale illégitime à cause de ses nombreuses compromissions et sa propension à la recherche des intérêts personnels égoïstes.

C’est en fin 2016 que les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont entrées dans cette crise dite anglophone qui 4 ans plus tard s’est transformée en véritable guerre entre des forces de sécurité nationale et des bandits et autres terroristes qui réclament une sécession par la force des armes. Si l’on peut dire sans risque de se tromper que cette frange des séparatistes est bien minoritaire, l’on est en droit de se poser des questions essentielles sur le rôle que joue l’élite locale dans cette crise. Pourtant, il est de notoriété publique que la faible légitimité de la plupart des élites anglophones dans leurs régions, le sous-développement, la fracture générationnelle sont des maux communs au Cameroun. Mais la combinaison d’une mauvaise gouvernance et de la question identitaire sont particulièrement difficile à traiter dans cette région anglophone.

On ne le dira jamais assez, le président Paul Biya, dans le cadre de la résolution de cette crise dite anglophone s’appuie sur quelques élites de cette région qui y sont ses yeux et ses oreilles. Si elles ne sont pas nombreuses, ces élites anglophones cooptées par le pouvoir central, l’étiolement de la confiance entre eux et la population anglophone ne fait plus l’ombre d’aucun doute.

On peut le dire. La cartographie de la violence dans ces régions est symptomatique de l’influence que l’élite joue dans certaines localités de ces régions. Là où certaines élites sont encore adulées et bien intégrées au sein de la population avec laquelle elles partagent le quotidien, on voit que la situation y revient à la normale, que la vie y reprend progressivement. Par contre, là où l’élite a été honnie, les séparatistes y ont réussi à installer leur règne et ceci parce que cette élite-là n’arrive pas à convaincre les Amba boys à déposer les armes et à revenir dans la République avec toutes les facilités que le gouvernement consent pour eux. Ce manque d’emprise de l’élite sur les sécessionnistes est également cultivé par les ambitions et les rivalités personnelles et ethniques d’élites qui n’ont pas toujours su faire front commun pour défendre une cause anglophone de plus en plus hétéroclite. Les jeunes ont dénoncé la rhétorique ethnique de leurs élites.

Cette mobilisation est donc révélatrice du fossé entre l’élite anglophone, qui a depuis très longtemps tenté de jouer un rôle d’intermédiaire entre Yaoundé et les populations anglophones, et a parfois même soutenu une répression dure, et les préoccupations des populations anglophones. En effet, le Premier ministre et les élites anglophones, qui ont essayé de jouer ce rôle de médiateur au début de la crise, ont été conspués par la foule. Le déficit de légitimité des dirigeants anglophones concerne aussi, à un moindre degré, les chefs de l’opposition. A titre illustratif, en novembre 2016, le président du Social Democratic Front (Sdf), Ni John Fru Ndi, s’est fait huer à Bamenda alors qu’il tentait de calmer une foule en colère.

La crise crée des tensions au sein du Sdf entre une frange plus radicale qui, à l’image du député Wirba, réclame une fédération à 2 Etats ou la sécession, et une frange plus traditionnelle réclamant le fédéralisme à quatre états ou, pour les plus modérés, une meilleure décentralisation. Pour être en phase avec son électorat, le Sdf a accentué en 2017 sa revendication du fédéralisme à quatre états tout en prenant des mesures symboliques comme la non-participation au défilé du 20 mai en solidarité avec les détenus anglophones. On n’était alors là au cœur du double jeu permanent pratiqué par la Sdf en quête de strapontins.

Mal leur en a pris, ils ont tout perdu. Le Chairman du Sdf s’est même souvent fait kidnapper pour augmenter son crédit auprès des populations, mais les résultats n’ont pas été à la hauteur de ses prétentions. Même au sein du Rdpc au pouvoir, les députés anglophones ont fait part de leurs inquiétudes au gouvernement. Rien n’y fait. Pour certains analystes, un fossé générationnel important, un système de gouvernance reposant sur la cooptation des chefs traditionnels et des élites locales, et une politique d’équilibre régional détournée au profit de grandes familles liées au régime ont fini par radicaliser une bonne partie de la population qui à un moment de la crise a commencé à flirter avec les séparatistes.

Il a fallu que ces derniers commencent à se montrer plus barbares que leur crédit de confiance a commencé à se diluer et attirer le rejet des populations. En effet, la résolution du conflit ne repose-t-elle pas aujourd’hui dans un renouvellement d’une classe d’élite plus proche des populations et donc une rupture totale avec l’élite actuelle cooptée, arrogante et prévaricatrice ? L’on ne perd rien à essayer.

La Nouvelle